Suicide mimétique ou Effet « Werther »

Suicide au travail et effet Werther: à propos des suicides à France Telecom

Effet Werther

L’effet Werther ou suicide mimétique est un phénomène mis en évidence en 1982 par le sociologue américain David Philipps, qui a étudié la hausse du nombre de suicides suivant la parution dans les médias d’un cas de suicide. Le nom est inspiré par une vague de suicides s’étant produit en Europe lors de la parution du roman de Goethe, Les Souffrances du jeune Werther .

Le roman Les souffrances du jeune Werther, a été publié en 1774. Il raconte le suicide d’un jeune homme à la suite d’amours déçues. Peu après sa parution, une mode s’empare des jeunes allemands, qui imitent les façons vestimentaires du couple sujet du roman, Charlotte et Werther. Pendant les mois qui suivent, on assiste à une vague de suicides par revolver selon les mêmes modalités que celle utilisées par le héros, qui conduit l’Église à demander l’interdiction du livre en Europe, et les autorités allemandes à Leipzig, danoise à Copenhague, et italiennes, à réaliser cette interdiction.

Umberto Eco s’interroge sur le fait qui pousse des être humains réels à compatir aux souffrances de héros de fiction plus volontiers qu’au sort d’inconnus dans le monde vivant des souffrances réelles. Il conclut que « la fiction suggère que peut-être notre vision du monde réel est aussi imparfaite que celle des personnages de fiction. C’est pourquoi des personnages de fiction réussis deviennent des exemples primordiaux pour la condition humaine « réelle ». »

L’effet Werther de David Phillips
En 1974, le sociologue David Philips indique que, malgré ces interdictions, le lien de cause à effet entre cette vague de suicides et la parution du roman n’a pas pu être étudiée. Il cite Durkheim, pour qui, si le suicide d’un proche peut générer quelques cas dans son entourage, ceci ne peut affecter une hausse du taux de suicide au niveau national. Toutefois, en étudiant les cas de suicide entre 1947 et 1968 en Angleterre et aux États-Unis, Phillips démontre une corrélation entre publication dans la presse de cas de suicide, et hausse des suicides immédiatement après, la corrélation étant d’autant plus forte que la relation du cas a été très médiatisée. En 1986, il constate le même type de corrélations dans les sept jours suivants, en s’appuyant cette fois-ci sur des cas relatés par la télévision au niveau national. Il montre que là encore la hausse est d’autant plus grande que le relayage médiatique a été intense. Bien que d’autres théories aient pu être avancées, dont des causes d’erreur de traitement statistique, il conclut à un lien direct entre exposition par la télévision et hausse du taux. Il baptise ce phénomène d’effet Werther. Il dupliquera l’année suivante ces études à des œuvres de fiction.

Il réalise enfin une synthèse de ses travaux en 1992, sous le titre Suicide and the media, où il met en avant des effets d’imitation et de suggestion.

(Un article de Wikipédia, l’encyclopédie libre).

http://prevention.suicide.free.fr/wp-content/uploads/suicide_mimetique.mp4

Extrait de l’émission « Spécimen », de la télévision suisse RTS (2014) Non verbal et mirroring – Effet caméléon : tous des moutons?

FRANCE CULTURE (2014) « Suicide au travail : les employeurs devant la justice »

FRANCE CULTURE; Emission « Sur les docks » (09/01/2014) « Suicide au travail : les employeurs devant la justice »

Les affaires de suicide au travail sont de plus en plus souvent l’objet de plaintes contre l’employeur. La plupart du temps, les affaires sont jugées au Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale. Les victimes tentent d’y faire reconnaître le suicide en accident du travail et parfois attaquent l’employeur pour faute inexcusable. Les délais sont longs et les condamnations sont souvent jugées insuffisantes par les victimes. L’entreprise étant, au pire, contrainte à prendre à sa charge le versement de la rente attribuée en réparation aux familles…

Les familles n’hésitent plus à porter plainte au pénal contre l’employeur pour homicide involontaire, évoquant même parfois la « mise à mort » par le travail.

Quelle que soit la juridiction, chaque procès est lourd, douloureux, éprouvant, la défense n’hésitant pas à mettre en avant les fragilités personnelles du salarié. La vraie difficulté étant d’établir le lien de cause à effet entre harcèlement, surcharge de travail ou mauvaise organisation du travail et suicide.

Bien plus que de demander une réparation (impossible) la motivation des familles semble plutôt qu’on établisse la gravité des faits ainsi que la responsabilité. Ne plus avoir à faire à un management qui joue avec le moral de ses employés.

Frédérique Guillon, secrétaire de l’ASD Pro, expose les difficultés à faire reconnaître les suicides en accidents du travail

FRANCE CULTURE (2014) « Burn out », le combat d’Ilma

FRANCE CULTURE, Emission les pieds sur terre (06/01/2014) « Burn out », le combat d’Ilma

Ilma Choffel, veuve d’un cadre supérieur de la Poste, se rend au cabinet d’avocat Teissonnière qui lutte contre la délinquance industrielle, et expose le cas de son mari, qui s’est suicidé à 51 ans à la suite d’un « burn out ».

Reportage : Inès Léraud; Réalisation : Alexandra Malka

FRANCE CULTURE (2012) Travailler mieux pour vivre mieux: réflexions pour d’autres perspectives d’organisation du travail

 FRANCE CULTURE; Emission « les Chemins de la connaissance » (07.12.2012) Travailler mieux pour vivre mieux : réflexions pour d’autres perspectives d’organisation du travail

Cela ne devrait pas exister, mais c’est la triste réalité : il existe des femmes et des hommes malades du travail, il se rencontre des épuisés de la vie qui n’ont plus le courage de résister au « management de la peur » et à la pression gestionnaire. Ceux-la ne supportent plus la dévalorisation de leur métier, ils ont honte de la malfaçon, ils regrettent le temps de la coopération entre collègues ; alors, ils se sentent inutiles, et perdent toute estime de soi. Or contrairement à ce qu’on pouvait attendre, les travailleurs qui se suicident sur leur lieu de travail sont rarement des sujets marginalisés. Ce ne sont pas uniquement les bras cassés qui se suicident au travail. Et puis le malaise au travail ne débouche pas toujours – heureusement – sur de tels actes de désespoir. La souffrance s’y exprime parfois de manière sourde et diffuse. Et certains travailleurs sont contraints de suspendre leur pensée. Que veut dire alors cet état de chose ? Il signe la preuve que la gestion est entrée en lutte contre les métiers. Le travail en effet n’est pas objectivement mesurable, il ne se réduit pas au but à atteindre. Pour éprouver le fait de travailler, il faut mobiliser son intelligence, son savoir-faire, être rusé. Travailler, c’est se transformer soi-même, y compris par l’effort. Ce n’est jamais répondre uniquement au travail prescrit. Or la gestion fait croire le contraire. Elle entend tout maîtriser. Le gestionnaire en ce sens est un adversaire du travail. Et quand ce n’est pas le gestionnaire, ce sont les objectifs prescrits par les nouvelles technologies, et l’autocontrôle induit par des programmes reposant sur des objectifs exclusivement quantifiables.Pour ne pas entériner ce malaise, nous avons réunis un grand clinicien du travail et un grand spécialiste du droit social pour parler de souffrance au travail et de justice sociale. Nous les avons réunis pour tenter de penser ensemble l’intelligence subjective au travail et la coopération collective au travail.

En un mot : l’humanisation des rapports sociaux, et notamment dans le travail, laquelle permet de se réaliser soi-même dans des œuvres utiles à tous.

Invité(s) : Christophe Dejours, psychiatre et psychanalyste, professeur au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM); Alain Supiot, professeur au Collège de France, Directeur de l’Institut d’études avancées de Nantes, auteur de « L’esprit de Philadelphie : La justice sociale face au marché total ».